44e Régiment de Sapeurs Lanciers
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Message par Gérard Bouchard Lun 14 Déc - 17:50

Voici un petit RP que j'avais écris y'a exactement 7 ans (21/09/2007), que je viens de retrouver dans mes cartons, je le publie pour le centenaire de la guerre de 14

7h00

Dans la tranchée tout le monde s’agite déjà. Le ballet des soldats venant de l’arrière est en marche. D’autres, arrivés avec des gros sacs, distribuent des munitions.
Je me lève.
Au moment de prendre mon fusil, je découvre avec horreur le cadavre dévoré de Dédé, notre mascotte. Le pauvre chien s’est fait étriper par les rats pendant la nuit.
De rage, je prends ma baïonnette et en plante un qui courait tout près. Le sang gicle. Ils sont gros et gras… C’est bien les seuls…
Le caporal passe parmi nous pour nous dire que dans vingt minutes nous allons donner l’assaut. Un sifflement passe au-dessus de ma tête et un obus tombe dans un des boyaux qui aboutissent à notre tranchée, en plein dans une compagnie d’Africains, toujours en train de chanter.
Explosion.
C’est le carnage. Des membres retombent tout autour. Une main coupée au niveau du poignet tombe juste devant moi et éclabousse mon pantalon de sang. Je me détourne. Il y a de plus en plus d’hommes qui arrivent dans la tranchée. Les allemands se sont réveillés eux aussi et nous soumettent à un pilonnage intense.
Notre lieutenant émerge du boyau du poste de commandement. Il nous regarde. Nous avons tous les traits tirés, les habits déchirés et couvert de boue. Lui-même a renoncé à cirer ses bottes. Une fine barbe a envahi son jeune visage.
Tout à coup, le sifflet du capitaine retentit ; Le lieutenant tire son sabre, crie « Pour la France ! » et jaillit hors de la tranchée. A peine sortis, nous sommes accueillis par un feu nourri. Plusieurs camarades touchés basculent en arrière dans la tranchée, faisant tomber d’autres hommes. Nous courons sur ces deux cent mètres de cratères qui nous séparent de la tranchée ennemie. Nous hurlons pour nous donner du courage ; Je tire en l’air pour ne pas blesser deux qui sont devant.
Je pense à Claire, ma chère épouse, à mes enfants. Elle qui, enceinte de 3 mois, avait, serrant contre elle nos deux aînés, dit « Ne vous inquiétez pas, papa sera revenu très vite ».
Une larme coule sur ma joue.
Au bout de cinq minutes de course, nous ne sommes plus qu’une quinzaine à courir à travers les balles.
Tout à coup, le lieutenant s’effondre, la tête fracassée par une balle. Il y a un moment de flottement jusqu’à ce que le caporal crie « Pour le lieutenant ; pour la France ». Une grenade éclate.
Deux camarades disparaissent.
Au moment où nous sautons dans la tranchée allemande, le caporal tombe touché à bout portant.
Un instant le silence se fait ; Des regards de haine et de peur se croisent… Finalement, ils sont comme nous : Sales et vidés de leur humanité.
Puis, mus par la violence de nos habitudes, nous nous élançons, allemand et français, victime contre victime, pion contre pion, unis par notre devoir et nos cris de peur et de rage. Je sens alors une douleur atroce. Un allemand vient de me donner un coup de baïonnette. Je croise le regard de culpabilité, bleu, de ce jeune allemand. Mon sang chaud coule. Je tombe à genoux, étrangement apaisé. Je souris. Tout devient flou. Le bruit s’estompe. Je vois Claire, mes enfants et tous les visages de mes camarades emportés par cette guerre. La lumière disparaît. Je tombe, le nez dans la boue sanglante, sur cette belle terre de France.

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Gérard Bouchard

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Date d'inscription : 01/07/2013

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